K. de Montpellier vu par M.Y
Je vous ai quelque peu présenté mon amie M.Y, de Montpellier, à travers ses derniers écrits choisis et publiés alors sur sa page FB. ne pas laisser cette voix s'éteindre totalement et donc le désir, ici, de faire entendre sa façon de décrire le monde qui l'entoure au quotidien. J'ai, à mon tour, rencontré K. Mais ici, je laisse directement la parole à Maya... A quoi bon rajouter quelque chose ? Je me suis permis d'y associer une photo prise par M.Y, indépendamment de cet écrit. Un écrit particulier qu'on appelle un haibun où figure un texte entrecoupé de haïkus.
Fran Nuda
sur sa boule
son regard me plaint
rentrée du boulot
Pour l'histoire il s'appellera K. Je le connais depuis deux ans maintenant. Je ne me souviens plus de notre première rencontre, comme si K avait toujours été là. Été comme hiver, K est toujours le même, pas tout à fait l'identique mais toujours le même. Il s'assied sur une grosse boule en marbre noir du Brésil, elle aussi la même, été comme hiver, dans le vent ou en plein soleil. Une autre constante chez K, c'est qu'il ne perd jamais sa boule. Une seule variante le distingue, la couleur de sa peau. En hiver elle est pâle parce que recouverte d'un poncho en patchwork, un poncho dans lequel il s'emmitoufle jusqu'au bout du nez. En été, elle est nue côté torse, et elle prend la couleur des vacances.
K a les cheveux mi longs, leur couleur rappelle les épis de blé sous un ciel d'orage. Il les retient avec un bandeau tout fin qui lui barre le front, ce qui lui donne l'allure d'un indien post moderne. K. sourit toujours. Il est dans la rue depuis plusieurs années, mais il n'en a ni la noirceur ni l'odeur. Quand je lui fais la bise, je ne me pose pas la question de savoir si je vais choper des poux, la tuberculose, ou la gale. Quand j'approche ma bouche de sa joue, je sens l'odeur de l'herbe, de la cigarette roulée, ou de la faim aux talons. A chacune de nos rencontres, il va me poser des questions sur mon travail, ma santé, mes activités... il est content d'être là, dans la rue, sans avoir d'autres devoirs que celui d'offrir des sourires aux passants, de la joie à profusion. K est heureux de son sort. Il n'a jamais besoin de rien. Ni d'argent, ni d'alcool, ni de pain. Il dit avoir le plus important : le soleil, le temps et la bonne humeur. Aujourd'hui, il m'a hélée, pour me demander où j'allais : me faire masser, lui répondis-je. On en est tous là, me dit-il avec son sourire d'ersatz de Christ. Si tu veux, ajouta-t-il, je pourrais te masser aussi. Ça t'évitera de dépenser tes sous. Je regardai autour de moi pour savoir où il aurait pu le faire, parce que K n'a ni maison, ni toit, ni abri. Il ne me dit jamais d'ailleurs où il dort. Il se contente de cette injonction : ne t'inquiète pas, je me débrouille. K vit mon regard hagard. Qu'est-ce que tu cherches ? Un endroit où tu pourras le faire... il partit d'un éclat de rire aussi clair que l'eau douce sur des galets polis : ça peut se trouver, Maya, ça peut se trouver si tu te décides un jour...
toute la semaine
Fran Nuda
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Photo prise par M.Y à Sète, je pense |
sur sa boule
son regard me plaint
rentrée du boulot
Pour l'histoire il s'appellera K. Je le connais depuis deux ans maintenant. Je ne me souviens plus de notre première rencontre, comme si K avait toujours été là. Été comme hiver, K est toujours le même, pas tout à fait l'identique mais toujours le même. Il s'assied sur une grosse boule en marbre noir du Brésil, elle aussi la même, été comme hiver, dans le vent ou en plein soleil. Une autre constante chez K, c'est qu'il ne perd jamais sa boule. Une seule variante le distingue, la couleur de sa peau. En hiver elle est pâle parce que recouverte d'un poncho en patchwork, un poncho dans lequel il s'emmitoufle jusqu'au bout du nez. En été, elle est nue côté torse, et elle prend la couleur des vacances.
été comme hiver
le poncho tout près - qui sait
la couleur de ses nuits ?
le poncho tout près - qui sait
la couleur de ses nuits ?
K a les cheveux mi longs, leur couleur rappelle les épis de blé sous un ciel d'orage. Il les retient avec un bandeau tout fin qui lui barre le front, ce qui lui donne l'allure d'un indien post moderne. K. sourit toujours. Il est dans la rue depuis plusieurs années, mais il n'en a ni la noirceur ni l'odeur. Quand je lui fais la bise, je ne me pose pas la question de savoir si je vais choper des poux, la tuberculose, ou la gale. Quand j'approche ma bouche de sa joue, je sens l'odeur de l'herbe, de la cigarette roulée, ou de la faim aux talons. A chacune de nos rencontres, il va me poser des questions sur mon travail, ma santé, mes activités... il est content d'être là, dans la rue, sans avoir d'autres devoirs que celui d'offrir des sourires aux passants, de la joie à profusion. K est heureux de son sort. Il n'a jamais besoin de rien. Ni d'argent, ni d'alcool, ni de pain. Il dit avoir le plus important : le soleil, le temps et la bonne humeur. Aujourd'hui, il m'a hélée, pour me demander où j'allais : me faire masser, lui répondis-je. On en est tous là, me dit-il avec son sourire d'ersatz de Christ. Si tu veux, ajouta-t-il, je pourrais te masser aussi. Ça t'évitera de dépenser tes sous. Je regardai autour de moi pour savoir où il aurait pu le faire, parce que K n'a ni maison, ni toit, ni abri. Il ne me dit jamais d'ailleurs où il dort. Il se contente de cette injonction : ne t'inquiète pas, je me débrouille. K vit mon regard hagard. Qu'est-ce que tu cherches ? Un endroit où tu pourras le faire... il partit d'un éclat de rire aussi clair que l'eau douce sur des galets polis : ça peut se trouver, Maya, ça peut se trouver si tu te décides un jour...
toute la semaine
le Christ de la Comédie
multiplie la joie
multiplie la joie
Maya Y.
plein de chaleur ,de tendresse ,d affection ,d humanité
RépondreSupprimerde constater a quel point cette personne était humaine et sans préjugés j ai été très émue
de lire ce qu elle a écrit c est ce que je ressent personnellement quand je vois des k
au lieu de détourner le regard ,un sourire,de jolies paroles c est gratuit .....
merci Maya d être parmi nous j aurais aimé vous connaître !
merci à toi fran de nous faire découvrir ton amie ...!
Elle t'aurait beaucoup appréciée c'est une évidence... Merci Lyly
SupprimerUne belle âme Maya et un très beau texte. JeJe ne peux m'empêcher de penser à ma maman qui s'arrêtait toujours pour saluer et discuter un sans abri près de chez ma grand-mère .Je me souviens du sourire de cet homme, et de ses yeux limpides, derrière lesquels se cachaient le drame de sa vie .
RépondreSupprimerMaya vit toujours à travers toi et je suis heureuse de la connaître au travers de ses écrits.
Il est en zffet des gens qui élèvent leurs mots plutôt que la voix pour que la vie nous offre dans sa tragique destinée des temps qui nous poussent à l'aimer malgré tout et d'en extraire quelque suc. Il semblerait que ta maman soit aussi de ceux-là. Heureuse que ce texte te le rappelle.
SupprimerQuel texte. Un régal du début à la fin. Un texte à absorber, à dévorer avec gourmandise, sans retenue aucune. Merci Fran pour nous donner à lire, je dirai même à vivre, un texte pareil !!!
RépondreSupprimerHeureuse de voir que mon amie Maya, par ses mots, a réveillé en toi le goût de ce blog. Une personne que tu aurais apprécié e et réciproquement.
SupprimerQuel beau texte plein de gentillesse, de bonté, qui nous donne une leçon d'humilité et qui fait chaud au coeur ! Ton amie Maya devait avoir un coeur d'or pour écrire de si jolies choses. Une merveille ce texte, un grand merci à toi Fran de le partager.
RépondreSupprimerMerci Patricia de ta fidélité ici quelle que soit la publication.
SupprimerUne personne tres sensible , interressante ton amie , le genre de personne qu’on est heureux de rencontrer dans la vie et que jamais on n’oublie .
RépondreSupprimerUn peu comme K.
Jamais je n'ai eu autant d'osmose immédiatement avec une personne et c'est pourquoi je la porte en moi encore... Ou serait-ce le contraire ?
SupprimerPoignant, c'est le premier mot qui me vient.... que d'amour des autres dans ce portrait !.... on ne peut qu'être une belle personne lorsqu'on peut voir ainsi le monde qui nous entoure et être capable de l'écrire si bien... Merci Fran
RépondreSupprimerMerci Marie-Hélène. Il me plaît en effet de prolonger l'existence de ce qui nous ont quittés ou mettre en lumière ceux qui restent en retrait parfois par choix parfois aussi hélas par contrainte.
SupprimerUn bien tendre texte.... c’est bien Fran, de perpétuer la mémoire de ton amie... émouvant..... merci! ��
RépondreSupprimerMerci Anne de la lire et d'y contribuer aussi donc.
SupprimerUn texte touchant.Merci Fran de nous faire découvrir et faire revivre Maya à travers ses écrits.Une personne qui ne juge pas et qui voit tout ce qu'il peut y avoir de beau dans tout être humain.
RépondreSupprimerOui elle avait le sens du Beau, trop peut-être pour en supporter le contraire. Merci à toi de la lire.
SupprimerUn texte rempli de tendresse, et d authenticité, Maya avait des valeurs de cœur, elle a aimé chez K sa simplicité, sa joie de vivre, son naturel .
RépondreSupprimerJe comprend ton attachement à cette Amie et ton envie de nous la faire connaître à travers ses écrits
Merci Martine et heureuse de te lire ici
SupprimerMerci chère Fran pour le partage de ce Texte de Maya et de cette (sa) photo. Très touchant… Quel bel hommage tu lui fais là, c'est beau ! Soiz (((*_*)))
RépondreSupprimerMerci Soiz et bien contente de te revoir sur le blog.😘
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